L’école et les neurosciences : mythes et réalité

À chaque sortie de rapport PISA, la France de l’éducation déprime à l’idée que le pays des Lumières se trouve de plus en plus bas dans les classements mondiaux. Pourquoi n’arrivons-nous pas à éduquer nos enfants correctement ? Pourquoi un tel taux d’illettrisme ? Pourquoi ce piètre niveau de raisonnement mathématique ? Pourquoi tant de violence dans les collèges ? Que faire pour améliorer la situation ?

Rédigé par Paul Boucher, le 31 Jan 2018, à 14 h 30 min
L’école et les neurosciences : mythes et réalité
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Au mois d’octobre 2017, Laurent Alexandre, médecin et chroniqueur au Monde, a sorti un livre choc : La guerre des intelligences, comment l’intelligence artificielle va révolutionner l’école. Le livre nous décrit une société dominée par l’intelligence artificielle, où chaque pays devra réorganiser ses écoles pour augmenter le QI des enfants, de peur de se trouver relégué à la catégorie des pays sous-développés, de plus en plus éloignés des pays gagnants. Il faut, d’après M. Alexandre, investir massivement dans les recherches en intelligence artificielle pour permettre à nos enfants d’être formés selon des normes scientifiques.

Neurosciences : la guerre des intelligences

Le ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer, vient de créer plusieurs commissions pour « définir la stratégie nationale en matière d’intelligence artificielle et donner un nouvel élan à l’école »(4). Il a fait appel entre autres à Cédric Villani, mathématicien lauréat de la médaille Fields, à Stanislas Dehaene, spécialiste des neurosciences et professeur au Collège de France, à Boris Cyrulnik, psychiatre de renom, ou à Esther Duflo, économiste au MIT. Ceci « pour sortir l’école de la nasse idéologique pédagogiste où elle est engluée depuis une quarantaine d’années »(5). Est-ce donc la solution miracle pour engager les écoles françaises sur la bonne voie ? Tout le monde n’est pas d’accord !

neurosciences, école, éducation

ZADistes de la pédagogie contre élite scientifique ?

Ce mouvement n’est pas sans soulever beaucoup de questions chez les enseignants et les parents d’élèves, et on voit déjà un mouvement de protestation prendre forme.

On peut en mesurer la teneur à partir de l’extrait suivant, lu récemment sur le blog éducation 3. Canalblog : « le nouveau pape scientifique, Stanislas Dehaene, nous dit que le cerveau fonctionne comme ceci et pas comme cela qu’il faut lui donner tant de syllabique dans tels manuels, etc… et que ça marche…L’école était déjà industrielle, pas la peine de la changer, avec un peu plus de science, peut-être même avec des enfants OGM…, super connectés aux manuels et aux ingénieurs éducatifs, vous allez voir»(1) !

Savoir raison garder

Comme d’habitude dans ce genre d’affrontement, la vérité se trouve quelque part entre les deux extrêmes : ni adoption aveugle des dernières modes pédagogiques, ni refus en bloc de tout ce qui touche à la science. Voici quelques notions de base pour vous aider à y voir plus clair.

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Ne pas confondre neurosciences et intelligence artificielle

L’intelligence artificielle est, d’après Wikipédia : « l’ensemble de théories et de techniques mises en oeuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence ». Retenez donc ces deux termes clés : « machines », et « simuler l’intelligence ». L’IA est faite pour résoudre des problèmes de nature algorithmique de forte complexité. Comme son nom l’indique elle est… artificielle.

Peut-elle être un adjuvent de la pédagogie ? Permettre, comme le promet Laurent Alexandre, de faire des « profils » d’élève pour adapter l’enseignement aux besoins particuliers de chacun ? Peut-être le pourrait-elle dans un avenir assez lointain, avec beaucoup, beaucoup d’argent et une formation approfondie des enseignants. Mais pour le moment la vraie question est ailleurs.

Qu’apportent les neurosciences à l’éducation ?

Les neurosciences englobent l’ensemble des recherches scientifiques consacrées au fonctionnement du cerveau humain. Donc, d’une certaine façon l’IA en fait partie, dans la mesure où les chercheurs doivent évidemment étudier d’abord le cerveau pour pouvoir imiter certaines de ces fonctions.

Plus généralement, le neuroscientifique va observer par imagerie électromagnétique les zones du cerveau qui « s’allument » quand l’enfant (ou l’adulte) est en train de résoudre un problème langagier ou mathématique ou mémoriser une définition ou la table des multiplications. Il peut ainsi mesurer l’efficacité de certaines pratiques, ou du moins penser qu’il le fait, selon de degré d’activité cérébrale observée.

Mettant de côté des querelles qui se sont développées autour de telle ou telle pratique, comme l’apprentissage syllabique de la lecture, un parcours des articles et monographies récents consacrés au sujet nous apprend un certain nombre de choses simples.

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Professeur d’université à la retraite, Paul aime observer le monde moderne et ses évolutions. Il s’intéresse tout particulièrement à l’économie...

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