Exportations de bétail : des vaches à la mer…

Vaches, veaux et moutons ne sont pas censés avoir le pied marin… et pourtant, savez-vous que près de 10 millions d’entre eux ont traversé la Méditerranée depuis 2013, à leurs risques et périls ? Une enquête révèle les dures conditions des exportations de bétail par les voies maritimes…

Rédigé par Brigitte Valotto, le 19 Aug 2017, à 11 h 00 min
Exportations de bétail : des vaches à la mer…
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Bateaux inadaptés et surchargés, voyages beaucoup trop longs – jusqu’à quinze jours, dans des conditions souvent inacceptables : une enquête sur les exportations de bétail menée entre 2014 et 2016 par Animal Welfare Foundation (AWF) et  Tierschutzbund Zürich (TSB) soutenues par Animals International, Eurogroup for Animals et Compassion in World Farming (CIWF), révèle la dure réalité du transport maritime d’animaux vivants.

L’enquête est diffusée en France en exclusivité par CIWF, association créée en 1967 par un éleveur laitier en réaction à l’intensification de l’élevage, avec pour mission d’encourager des pratiques d’élevage respectueuses du bien-être des animaux et de proposer des alternatives viables et durables à l’élevage intensif.

Exportations de bétail par voies maritimes : une réglementation insuffisante… et non respectée !

Ce sont essentiellement des ovins et bovins qui sont transportés à travers la Méditerranée, pour aller vers l’Afrique du nord et le Moyen-Orient : 9,8 millions ont été recensés entre 2013 et 2016 sur neuf navires bétaillers – dont 4 seulement agréés par la France. 
La durée moyenne de transport dure de cinq à dix jours, mais certains voyages ont duré jusqu’à deux semaines : en effet, le Règlement (CE) 1/2005(1) qui régit le transport des animaux par la route, ne s’applique pas au transport maritime. Et, concernant ce dernier, aucune limitation de durée n’a été fixée !

D’autre part, les navires ne répondant pas aux conditions fixées par l’article 19 de ce même Règlement 1/2005 ne devraient jamais être autorisés à transporter du bétail. Toute insuffisante qu’elle soit, la réglementation existante n’est donc même pas respectée. D’autant plus qu’aucun responsable d’évaluer le bien-être des animaux, ou de s’assurer qu’ils soient traités conformément à la législation européenne, n’est jamais à bord.

Des car ferries transformés en navires pour l’exportation du bétail

Les bateaux inspectés par l’association étaient de simples car ferries ou cargos, transformés en navires bétaillers, au mépris de tous les risques encourus par les animaux. Rampes de chargement et déchargement trop pentues, angles droits, éclairage inadéquat, ventilation et systèmes d’abreuvement défaillants, litière insuffisante ou de mauvaise qualité, enclos surchargés manquant parfois de place en hauteur pour que les animaux puissent tenir leur tête droite : déjà affaiblis par leur transport en camion, les animaux tombent facilement malades ou se blessent dans ces bateaux totalement inadaptés.

exportations de bétail

Des conditions de transports inacceptables © Animal Welfare Foundation (AWF)

Ainsi transportés dans l’insécurité, sans que leurs besoins et leur bien-être soient pris en compte, ils sont souvent sujets à des maladies respiratoires, liées à la forte densité, aux forts taux d’ammoniac, aux chaleurs élevées et à l’humidité.

La mer pour cimetière

Malades, ces animaux ont plus de chances de finir au fond de l’eau que d’être soignés. En effet,  une fois morts, ils sont jetés par dessus bord après avoir été éventrés afin qu’ils sombrent plus vite. Leurs boucles d’identification sont arrachées pour que l’animal ne puisse être reconnu s’il venait à s’échouer sur une côte, et aucun journal de bord ne rapporte les décès, les naissances, les blessures ou tout autre problème de santé des animaux durant le transport en mer.

Entre 2013 et 2016, on estime qu’environ 24.000 animaux seraient morts sur un bateau, et passés par-dessus bord sans aucun contrôle, et qu’environ 575.000 m3 d’excréments ont été accumulés sur les navires puis rejetés en mer, soit environ la quantité d’eaux usées produite chaque année par une ville de 11.000 habitants ! Or, ces cadavres jetées au large ainsi que les déjections des animaux, peuvent propager des maladies et affecter sérieusement la faune et la flore marine. une atteinte à l’environnement non négligeable de plus à mettre sur le dos des exportations de bétail.

Mettre fin à aux exportations de bétail vivant ?

« Cette situation inacceptable est rendue possible par la mauvaise application de la règlementation pourtant insuffisante et la grande disparité des conditions requises par les différents États membres pour l’inspection et l’approbation des navires« , explique Léopoldine Charbonneaux, directrice de CIWF France. « Non seulement la réglementation doit être mieux appliquée, mais elle doit être renforcée et à terme, le commerce de carcasses doit remplacer le transport d’animaux vivants« .

exportations de bétail

Il est urgent de mettre fin au transport d’animaux vivants © Animal Welfare Foundation (AWF)

Pour l’instant, au contraire, l’exportation d’animaux vivants est un commerce en forte croissance… au détriment des animaux et de l’environnement. Faute de pouvoir encore l’interdire, la CIWF demande au moins une meilleure application de la réglementation et la mise en place de dispositions spécifiques au transport maritime, avec notamment la mise en place d’un Responsable Protection Animale obligatoire dans tous les navires.

Jusqu’à présent, ses appels en ce sens auprès du ministère de l’Agriculture sont restés sans réponse. L’association invite ses sympathisants à signer une pétition demandant au ministre de l’agriculture, Stéphane Travert, de soutenir la révision du règlement 1/2005 en vue d’interdire à terme les exportations de bétail sur pied hors de l’UE par voies terrestre et maritime. Enfin, le 13 septembre, la deuxième Journée de mobilisation internationale contre les transports sur de longues distances d’animaux vivants organisée par la CIWF aura lieu partout dans le monde.

Plus en savoir plus : https://fr.stoplivetransport.org

Références :
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Journaliste free-lance, Brigitte Valotto est notamment une collaboratrice régulière des pages enfants, société, pratique, tourisme et actu de...

1 commentaire Donnez votre avis
  1. On peut aussi rajouter un taux élevé de méthane et de CO2.

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